Le mois dernier j’ai introduis un article sur les créatifs, Créatifs, qui sont ils ? 1 . Aujourd’hui je vous propose de rencontrer deux infographistes. Lors d’une interview jumelée nous avons échangé, beaucoup rigolé et tentez de vous présenter un bout de l’univers des créatifs. Ces mots sont leurs ressentis personnels et peuvent aider beaucoup de jeunes gens qui veulent s’orienter vers ce domaine.
Qui nous parle ?
Bini Nazaire Directeur Artistique Alexandre Williams, Infographiste
Qu’est ce que vous aimez dans votre métier ?
Bini : Ce que j’aime dans mon métier c’est la liberté de venir à l’heure qui me convient. Je parle surtout de liberté dans le sens où nous ne sommes pas soumis aux horaires académiques. On peut bosser un jour de 8 heures à 10 heures et un autre jour de 19 heures 30 à minuit. Même étant en agence c’est possible. Parce que l’avantage des agences, est que les dirigeants sont flexibles sur les heures de créatifs. Le plus important qu’on soit en agence ou en free-lance, c’est le respect des délais donnés aux clients. J’aime aussi le fait d’avoir une longueur d’avance sur la population en terme de réflexion. Ce qui peut émerveiller la population, nous l’avons déjà vu des mois auparavant. Nous sommes en quelque sorte des influenceurs. On s’éclate vraiment !
Alexandre : Moi ce que j’aime c’est la liberté d’être comme on veut ! Je peux porter n’importe quoi; le client comprend, mes patrons aussi, ça c’est mon plus gros crush en terme de liberté. Pour le reste je rejoins mon collègue.
Qu’est ce que vous n’aimez pas dans votre métier?
Bini : Ce que je n’aime vraiment pas dans le métier, c’est le manque de culture publicitaire. On est dans un métier où tout le monde semble connaitre ou comprendre ce que l’on fait. Les gens peuvent te donner un brief et vouloir contrôler ta manière de l’exécuter, c’est vraiment dommage. Quand tu travailles avec quelqu’un qui respecte ta formation et ton professionnalisme c’est plus facile, car la personne comprend la marche à suivre en terme de délais, de débriefes … Donc oui le manque de culture publicitaire est ce que je déplore. Nous ne sommes pas des exécutants comme certains le croit. Ce que les gens ne savent pas c’est que nous les créatifs sommes un peu comme des enfants gâtés. On a notre jardin secret, il y a une marge, une limite que le client ne doit pas franchir. Et surtout le client dois nous faire confiance dans la réalisation de ses travaux. Pour certains clients, du fait qu’ils nous paient, ils ont le droit de nous dire comment travailler, de nous faire faire des débriefes même à des heures tardives. Je plains mes collègues qui travaillent en free-lance car c’est vraiment dur. Il faut comprendre qu’un travail, à partir du 3 ème débriefes, n’est plus le brief de base, c’est un nouveau brief, un nouveau travail.
Alexandre: Les débriefes tardifs ! Ceux qui arrivent en fin de journée. Franchement je déteste par dessus tout.
Commerciaux Vs créatifs, chiens et chats ou amis amis ?
Bini : (Rire) ça dépend, je dirai chiens et chats parce que les commerciaux ont tendance à dire cette phrase qui m’énerve : » le client a dit o » donc comme le client a dit, pour eux ont doit le faire. Le problème est que le commercial son objectif final est de faire signer le chèque au client. Pourtant l’infographiste travaille pour qu’on puisse reconnaître la valeur de son travail. Le portefeuille client du commercial contient les noms de ses clients. Le press book de l’infographiste montre la qualité de ses créations. Le commercial est quelqu’un qui a peur de prendre des risques, alors que nous nous sommes en quête d’innovation et de beau.
Alexandre: Tout dépend du commercial. S’il a une bonne formation il saura bien gérer le client et tout ira bien, donc le combat dépend du type de commercial avec lequel on travail. Une chose est certaine, en agence, nous sommes un peu comme des binômes. C’est lui qui sert d’intermédiaire entre le client et le créatif, qui doit défendre nos idées et autres, donc il doit y avoir une bonne communication entre nous.
Le monde actuel en pleine évolution, qui est le créatif de demain? Les technologies avancent je suppose que vos défis aussi !
Bini : Il faut savoir s’adapter. Les applications de logiciels se mettent à jour. Par exemple le Facebook d’aujourd’hui n’est pas celui d’il y a 4 ans. Le créatif de demain est celui qui arrive à s’adapter très facilement. Il est obligé d’apprendre encore et toujours. Il y a 10 ans on ne parlait pas de web designer mais aujourd’hui c’est une activité fleurissante. Même les Community Manager ont aujourd’hui besoin d’avoir des notions d’infographie. Le créatif de demain s’est celui qui sera avant-gardiste dans ses créations et saura s’adapter.
Alexandre: Pour moi le créatif c’est avant tout la créativité. Il ne sert à rien d’avoir toutes les technologies du monde si l’on a pas la créativité pour les utiliser.
Infographiste ou infographe
Bini : Nous sommes infographistes, on dit parfois infographe par abus de langage.
Alexandre: Les gens se trompent parce qu’ils ne savent pas tout simplement.
Arrivez vous à allier vie professionnelle et personnelle ? Entre les légendaires charrettes, certaines pressions et autres.
Bini : Je vais répondre pour nous deux, pour dire que tout métier à ses avantages et ses inconvénients. Il nous revient d’avoir une hygiène de vie et une organisation. Certaines personnes lorsqu’ils ont une idée en tête doivent forcément la matérialiser au moment même à contrario il y a ceux qui savent conserver leurs idées. Je pense que c’est faux de dire que quand on est infographiste on doit forcément faire des veilles, ne pas dormir… C’est une question comme je le disais tantôt d’organisation personnelle.
Quels conseils pouvez vous donner aux jeunes qui rêvent de devenir infographistes.
Bini : Nous sommes tous les deux d’accord pour dire que pour être un bon infographiste il faut avant tout se connaitre, connaitre nos capacités physiques et intellectuelles. Tu peux être entrain de bosser, tu creuses, tu creuses, mais quand tu te sens fatiguer, il faut arrêter, parce qu’une fois que le corps ne répond plus, tu peux passer à côté de beaucoup de choses. Dans la création il y a l’image mais aussi tout ce qui est relation texte-image, il y a la typographie, la mise en page et autre. Un bon créatif se doit dormir suffisamment et avoir une hygiène de vie.
Relation directeur de création et subordonnés, comment vivez vous l’autorité d’un supérieur qui a un regard et un avis parfois décisionnel sur vos créas?
Bini : Il y a un adage qui dit que la voix du milieu c’est la voix de la raison. Il faut toujours pouvoir trouver le juste milieu. Nous sommes dans un domaine ou c’est le travail de l’esprit, donc on conçoit des choses par rapport à notre ressenti personnel, l’autre débriefe aussi par rapport à son ressenti personnel. La seul terrain sur lequel on ne discute pas sont les éléments du brief qui sont contenus dans la créa. Donc entre le Directeur de Création, le Directeur Artistique et les infographistes il doit y a avoir un bon management. C’est donc au premier responsable de trouver comment faire travailler son équipe, car en fin de compte c’est lui qui répond du travail. Il doit savoir comment faire travailler l’infographiste sans lui imposer des directives précises mais chercher l’emmener à sortir le meilleur de lui même. Le Directeur artistique et le Directeur de création doivent être dans encadreurs . Et ils doivent toujours donner la chance aux infographistes de défendre leur travail. Le rapport donc doit être plus sur le management.
Alexandre: Il faut toujours avoir en tête qu’on a toujours un supérieur, et ça c’est dans tous les corps de métiers. Un bon créatif doit savoir écouter et accepter les critiques et les avis. Pour ma part ça passe souvent, d’autre fois pas du tout parce que je n’aime pas forcément être débriefé sur mon travail surtout quand j’estime avoir donné le meilleur. Mais un moment donné il faut savoir se remettre en question et défendre ses idées .
Devenir Directeur de Création est ce une fin de carrière ?
Bini : Nous sommes dans un métier où c’est la réflexion qui prime. En agence c’est vrai que le directeur de création a gravit tous les échelons, mais il n’est pas enfin de carrière. La plus grande erreur que certains font quand ils arrivent à ce stade, est de créer leur propre agence, je trouve ça dommage. Je pencherai plutôt pour une reconversion, car un directeur de création, de par son bagage intellectuel à des notions dans toutes les formes d’art. On va dire que nous sommes dans une tige, du graphiste au directeur artistique, une fois que nous arrivons au bout, le directeur de création se sont des feuilles, il faut maintenant sortir et aller vers d’autres horizons.
Alexandre: Je pense que arriver à ce stade c’est atteindre une réalisation professionnelle. C’est un honneur et une fierté, pas une fin de carrière, mais une porte ouverte pour de nouveaux challenge.
Quel est votre mot de fin ?
Bini : Je dirai que nul ne peut venir à ce métier sans amour. On a tendance à croire que les créatifs sont libres, riches et au dessus de tout, mais c’est faux ! Il va arriver des moments où tu seras obligé de laisser ta femme au restaurant pour votre dîner de mariage, de reprendre une campagne entière. Donc sincèrement si tu n’as pas la passion du métier n’essaie pas. Parce que quand on met du plaisir à faire ce que l’on aime, le résultat est toujours bon, mais si on le fais avec colère, le résultat sera mauvais, il faut être passionné.
Alexandre : Vive la créativité !